A la demande du cabinet EURISK et pour le compte du maître d’ouvrage, M. et Mme P, nous avons été missionné pour effectuer des investigations et un diagnostic géotechnique suite à l’apparition de fissures sur l’ouvrage. La présente étude s’inscrit dans le cadre de missions géotechniques de type G5 permettant de donner l’(les) origine(s) du sinistre et la(les) solution(s) confortative(s), selon la norme NF P 94-500 de novembre 2013 relative aux missions géotechniques.
Aléas géotechniques et conditions contractuelles
Les reconnaissances de sols procèdent par sondages ponctuels, les résultats ne sont pas rigoureusement extrapolables à l’ensemble du site. Il persiste des aléas (exemple : hétérogénéités locales) qui peuvent entraîner des adaptations tant de la conception que de l’exécution qui ne sauraient être à la charge du géotechnicien. Le présent rapport et ses annexes constituent un tout indissociable.
Situation du site
Le site d’étude est basé à MAROLLES-EN-BRIE dans le Val-de-Marne, à proximité du château de Grosbois.
Contexte géologique
D’après la carte géologique de BRIE-COMTE-ROBERT et sa notice (feuillet n°220) au 1/50 000ème (Figure 2) et du sondage n°BSS000RPHW, issu de la banque du sous-sol (BSS) du BRGM et situé à proximité du site d’étude, la succession des formations
géologiques potentiellement rencontrées dans la zone du site est découpée en cinq niveaux depuis la surface :
- Colluvions
- Marnes vertes et Glaises à Cyrènes
- Marnes blanches de Pantin
- Marnes bleues d’Argenteuil
- Calcaire de Champigny
En raison d’une certaine excentricité par rapport au site d’étude et une différence d’altitude entre les sondages, une variation latérale de faciès ou d’épaisseur des formations géologiques n’est pas exclue.
Hydrologie présomptive
Les entités hydrogéologiques possiblement rencontrées sont des entités à parties libres et captives à dominante sédimentaire. Les systèmes aquifères sont ceux du TertiaireChampigny-en Brie et du Soissonnais. On devra s’attendre à des stagnations temporaires et des circulations erratiques dans les colluvions.
Mission géotechniques et règlements utilisés
Conformément à non offre, notre cabinet d’expertise OMEGA EXPERT a reçu pour mission de réaliser des investigations géotechniques et de préciser les caractéristiques des terrains rencontrés par une série d’essais in-situ. Les reconnaissances des sols pratiquées sont conformes aux normes AFNOR et /ou font l’objet d’une description spécifique.
La campagne de reconnaissance réalisée par notre cabinet d’expertise en fissures comprend l’exécution de :
- un sondage à la tarière descendu jusqu’à 6 m ou au refus avec cinq essais pressiométriques ;
- un sondage à la tarière descendu jusqu’à 15 m ou au refus avec quatorze essais pressiométriques ;
- deux fouilles de reconnaissance de fondations ;
- un carottage de dalle ;
- deux teneurs en CaCO3 ;
- deux granulométries et sédimentométries ;
- trois limites de retraits ;
- trois VBS et limites d’Atterberg ;
- trois essais de gonflements ;
- vingt-deux teneurs en eau.
Situation générale et géologique
L’ouvrage se place sur un terrain présentant une pente sensiblement orientée N/E (amont) vers S/O (aval). L’altimétrie du terrain coté amont tangente les cotes 80 à 81 NGF en limite de propriété. Coté aval le terrain se situe vers la cote 77 NGF. Ces cotes sont extrapolées à partir des données « Géoportail ». D’après les renseignements pris, l’ouvrage est situé au droit de l’affleurement des formations du Sanoisien « Argiles vertes » et « Glaises à Cyrènes » surmontant les marnes supragypseuses du Ludien supérieur : marnes blanches de Pantin et marnes bleues d’Argenteuil. En subsurface, les formations argilo-marneuses peuvent être marquées par des éboulis de pente et des limons de couverture.
Nature du sol et caractéristiques mécaniques
En SP1 (zone aval)
Est observable un état de consolidation altéré des argiles sur le premier mètre, sensible à la percolation des eaux pluviales circulant en surface depuis l’amont du site. A l’interface des argiles vertes et des marnes blanchâtres, une zone de sur-consolidation vers 4,00 m. de profondeur liée à une valeur élevée du module pressiométrique révélée dans des marnes calcaireuses.
Une zone « d’altération » est observable à partir de 6,00 m. de profondeur par l’action d’un niveau aquifère non stabilisé et repéré en cours de sondage entre 6,00 et 7,40 m. de profondeur. Plus en profondeur, les marnes d’Argenteuil présentent un état « normal » de consolidation.
En SP2 (zone aval)
Une zone « d’altération » peut s’observer entre 1,00 et 3,00 m. de profondeur correspondant aux argiles vertes (1,00 à 2,00 m.) qui surmontent le toit des marnes blanchâtres (vers 3,00 m.). Cet ensemble présente des valeurs E/Pl inférieures à 9 et 8 caractérisant une zone « altérée » et sous-consolidée de terrains glissés ou qui ont flués sur la pente du versant.
Vers 4,00 m. de profondeur, est observable une zone sur-consolidée (à l’instar de SP1) ou, à la même profondeur, ont été révélées des marnes calcaireuses. A partir de 5,00 m. de profondeur, le sol présente un état « normal » de consolidation.
Niveau d’eau
En cours de campagne, il a été observé un niveau aquifère en SPA à partir de 6,00 m. de profondeur. En fin de campagne, ce niveau était partiellement stabilisé vers 7,00 / 7,40 m. de profondeur.
Cette situation est susceptible de varier, notamment en fonction de la saison et de la pluviométrie. On notera que des rétentions temporaires d’eau peuvent survenir dans les dépôts superficiels en toit des formations argileuses à l’occasion des saisons humides à fortes précipitations.
L’ouvrage
Le bâtiment sinistré est une maison (initialement des années 1970), de type RDC+C sur terre-plein constituée de plusieurs volumes :
- V1 (volume central) : fondé sur longrines et pieux (la profondeur des pieux est inconnue)
- V2 et V3 : système fondatif inconnu
- V4 (extension des années 1990) : fondé sur longrines et massifs
- Nota : sur le plan ci-avant, l’emplacement des pieux et massifs est donné à des fins d’illustration (nombre et localisation non vérifiées)
Les travaux passés
L’ouvrage a fait l’objet de travaux d’injection de résine expansive sous dallage (suite à une déclaration de sinistre par les précédents propriétaires ayant donné lieu à une prise en charge assurantielle de travaux confiés à l’entreprise URETEK).
Les injections ont étés réalisées sous dallage (et non sous fondations). Nous ne connaissons pas précisément l’emprise des injections (tout ou partie du dallage ? quantité ? profondeur ? …).
Il nous est indiqué que, malgré les injections, les désordres ayant évolués, des injections complémentaires ont étés réalisées à plusieurs reprises (entre 2010/2012 et 2017/2018 ?). Nous supposons que les injections ont étés réalisées uniquement à l’interface dallage /
couche de forme sans « traiter le sol » en profondeur.
Ces éléments (et en particulier le dernier point) devront être confirmés par l’entreprise URETEK car ils conditionnent les mesures réparatoires proposées ci-après.
Les hypothèses sur l’origine du sinistre :
L’ouvrage repose sur un terrain particulièrement sensible du fait de sa nature notamment argileuse et également du fait de sa position sur une pente de versant. Les sols rencontrés sur les trois premiers mètres sont plus ou moins fissurés et altérés par des phénomènes de « reptation » le long de la pente du versant.
Les argiles sont soumises directement à des circulations d’eau de pluie qui, en période de forte pluviométrie, altèrent la rhéologie de ces matériaux particulièrement sensibles aux variations hydriques à l’origine de phénomènes de retrait gonflement.
Les réseaux fuyards aggravent / accentue ces phénomènes.
Au moment des sondages, le sol d’assise présentait des indices de consistance IC de 1,08 à 1,25 caractérisant des sols déshydratés ou en cours de déshydratation.
Enfin, le système constructif hétérogène (massifs, pieux, dallage) et les périodes de retrait gonflement des argiles font subir à l’ouvrage des contraintes dans sa structure à l’origine des désordres observés.
Dispositions réparatoires
Notre étude porte principalement sur la problématique qui touche le(s) dallage(s) de l’ouvrage (et non ses fondations). Compte tenu du diagnostic géotechnique, plusieurs solutions de reprise peuvent être envisagées. Nous choisissons cependant de détailler celle qui nous parait la plus raisonnable économiquement : l’injection de résine expansive URETEK. En effet, au regard des résultats d’essais de laboratoire, et en particulier de la valeur CaCo3, celle-ci apparait applicable dans les sols en place – à confirmer par l’entreprise – .
Principe de reprise :
0° Suppression de toute la végétation à l’abord immédiat de l’ouvrage.
1° Mise en œuvre d’un drainage (raccordé à un exutoire correctement collecté) cotés pignons Est et Ouest et réparation des réseaux fuyards.
2° Temps d’attente de 6 mois minimum – dont 3 mois en période estivale – (afin que les sols s’assèchent suite à la collecte des eaux) qui pourra être à l’origine d’une réactivation significative des désordres.
3° Réalisation d’injections de résine expansive URETEK sous l’ensemble des surfaces de dallages. Ces travaux devront être entrepris dans le strict respect des règles de mise en œuvre de l’avis technique du CSTB, et assortie d’une garantie décennale. Les injections intéresseront vraisemblablement les sols sur une profondeur minimum de 3,50 m. (à confirmer dans le cadre d’une mission G2 AVP/PRO*). Des dispositions devront être prises (adaptation du maillage, des pressions …) pour ne pas interférer avec le système fondatif (et en particulier les pieux) et des contrôles adaptés seront entrepris après travaux (auto-contrôles de l’entreprise et contrôles externes dans le cadre d’une
mission G4)
(* A l’occasion de la mission G2AVP/PRO, il sera nécessaire de réaliser de nouveaux carottages de dallages, dans les volumes non sondés, afin de s’assurer que ces derniers présentent des épaisseurs et armatures satisfaisantes).
3 bis° En parallèle des injections, il conviendra de mettre en œuvre tous dispositifs complémentaires éventuellement recommandés par l’entreprise et/ou prescrits en phase conception par exemple un trottoir périphérique au droit de l’ouvrage.
4° Temps d’attente de 12 mois minimum (mise en observation) à l’issue du quel, en cas de réactivation ponctuelle de mouvements des injections complémentaires devront être mises en œuvre.
5° Reprise des embellissements (carrelage …). A cette occasion, après dépose des anciens revêtements de sol, en cas de découverte de « fractures » du dallage, des reprises structurelles devront être entreprises (suivant prescription d’un BET structure) avant mise en œuvre des nouveaux revêtements.
L’ensemble de ces travaux devra faire l’objet d’une conception et d’un suivi d’exécution par une maitrise d’œuvre spécialisée.
La partie injections devra faire l’objet d’études géotechniques complémentaires dédiées G2AVP/G2PRO (Conception externe), G3 (Etude d’exécution Entreprise), G4 (Contrôle externe).
L’intervention devra être supervisée par un contrôleur technique. Par ailleurs, au sujet des fondations, nous recommandons une mise sous observation de la structure. Dans le cas où les désordres s’aggraveraient il conviendra de mener des études complémentaires (géotechniques et structurelles), notamment la vérification du système fondatif par d’avantage de fouilles ainsi qu’un audit de rigidité structurelle. Ces
données complémentaires devront alors permettre de proposer une solution de reprise en sous-œuvre dans le cadre d’une mission G2AVP/PRO.
Solution alternative proposée par notre expert en fissures :
Dans le cas où le principe de reprise (du dallage par injection) décrit ci-avant n’est pas retenu, il conviendra de s’orienter vers une solution de plancher porté qu’il conviendra de coupler à une reprise en sous-œuvre généralisée. Cette alternative, si elle est retenue, devra alors être étudiée dans le cadre d’une mission G2AVP/PRO ; ces travaux nécessiteront également une maitrise d’œuvre spécialisée et une supervision par un contrôleur technique.